Contribuer à la diminution de 30 % du CO₂ émis par les moteurs d’avions de ligne et d’hélicoptères, c’était le défi du programme européen E‑BREAK achevé l’année dernière. Cette initiative ambitieuse réunissant 41 partenaires de 10 pays a reçu en décembre dernier un Prix « Etoiles de l’Europe » mention innovation pour son excellence technologique et la qualité des coopérations scientifiques générées.
Lancé par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche en 2013, le prix Etoiles de l’Europe met en avant les projets de recherche coordonnés par des structures ou entreprises françaises s’appuyant sur des partenariats à l’échelle européenne. Les lauréats sont sélectionnés parmi les initiatives soutenues par l’Union européenne dans le cadre d’Horizon 2020, son plan pluriannuel en faveur de la recherche et de l’innovation – 80 milliards d’euros pour la période 2014–2020.
Réunissant des laboratoires académiques, des centres de recherche privés, des PME et des motoristes d’envergure mondiale, le projet européen E‑BREAK (Engine BREAKthrough and subsystems) a mobilisé l’équivalent de plus de 2 000 experts de l’aéronautique. Il a reçu une subvention de 18 millions d’euros de l’UE pour 30 millions investis en tout. Piloté par Safran Helicopter Engines basé près de Pau, ce programme réalisé de 2013 à 2017 avait pour but de lever un certain nombre de verrous technologiques en mutualisant les compétences et les moyens expérimentaux.
« Un projet partenarial de cette ampleur est inédit pour Safran Helicopter Engines, coopérer avec des concurrents et des universitaires est une expérience atypique mais très enrichissante » analyse Manuel Silva, chef de projet recherche et technologies chez Safran Helicopter Engines diplômé de l’UTC en Génie mécanique qui a coordonné le projet. Plusieurs mois après, les retombées au niveau de la compétitivité et de l’économie ne manquent pas. 7 brevets ont été déposés. Les retours d’expérience prometteurs valorisables à plus long terme ont été nombreux. Plusieurs emplois ont été créés. Des écoles d’ingénieurs comme l’Ecole nationale des ingénieurs de Tarbes ou L’ISAE – SUPAERO de Toulouse ont gagné en visibilité et en reconnaissance vis-à-vis du monde industriel en raison notamment de la qualité de leurs plateformes expérimentales et de leurs compétences en simulation numérique.
Innover pour une aéronautique plus verte
E‑BREAK s’inscrit dans un contexte incitant les industriels et chercheurs à concevoir des avions moins polluants et plus économes en énergie. Alors que les avionneurs prévoient un doublement de la flotte à l’horizon 2035, l’ ACARE (Advisory Council for Aviation Research and innovation in Europe), organisme européen chargé d’élaborer une stratégie en matière de transports aériens, a fixé des objectifs de diminution des rejets de gaz à effet de serre et des dépenses énergétiques. E‑BREAK s’est attaché à l’étude de technologies rendant possible la conception de moteurs plus compacts et plus légers, moins consommateurs en carburant. Les pressions et températures plus élevées régnant dans ces turbomachines plus compactes mais fournissant une puissance équivalente posent en effet un certain nombre de nouveaux défis technologiques.
L’objectif était d’élaborer des sous-systèmes et des matériaux résistant à ces contraintes. Pas moins de six axes de recherche et 50 technologies ont été abordés pendant 4 ans et demi. Les objectifs ont été atteints ou dépassés dans dans 90% des cas. De nombreux tests sur des bancs d’essai ont été réalisés pour valider des résultats. Améliorer l’étanchéité grâce à des joints carbone de nouvelle génération, réduire le jeu entre la turbine et le stator en appliquant des revêtements de paroi plus performants thermiquement et mécaniquement, développer de nouveaux alliages plus légers compatibles avec des températures extrêmes tels les aluminures de titane, mieux contrôler l’état des pièces soumises à des contraintes mécaniques et thermiques importantes en recourant aux ressources de l’intelligence artificielle et du Big Data ont été quelques-unes des pistes explorées lors de ces années de recherche.