Anne-Virginie Salsac, spécialiste de la biomécanique des fluides au CNRS et exerçant au Laboratoire de biomécanique et bio-ingénierie à l’UTC vient d’être nommée « Femme en Or de l’innovation » en décembre 2015. Une récompense qu’elle accueille avec surprise et humilité, en ne manquant pas d’utiliser cette visibilité pour véhiculer quelques messages tant sur l’engagement dans la recherche scientifique que sur les exigences de la pratique scientifique actuelle et les applications pour le monde médical.
Cet or, vous ne le trouverez pas en creusant dans les caves de l’établissement ni en tamisant le lit de l’Oise. Car à l’UTC ce qui est précieux n’est pas toujours minéral, mais souvent humain. Et ce 12 décembre dernier, l’or s’incarne dans la personne d’Anne-Virginie Salsac élue ” Femme en or ” 2015 dans la catégorie innovation.
A 38 ans, la chercheuse du CNRS est non seulement une spécialiste internationale en biomécanique des fluides appliquée à la mécanique vasculaire et au génie biomédical, mais aussi une personne sensible et engagée. Un ensemble de qualités qui a séduit le jury de cette 23e édition des Femmes en Or, une distribution de trophées destinés à récompenser des femmes incarnant des valeurs essentielles. En récompensant Isabelle Autissier (femme en or de cœur) ou Agnès B. (femme en or de style), ce prix créé en 1993 récompense des personnes se distinguant par leurs valeurs essentielles et universelles comme la générosité ou la solidarité.
Trophée de l’innovation… et aussi du public
Anne-Virginie Salsac reconnaît sa surprise lorsque les organisateurs lui annoncent sa présélection, et encore plus lorsqu’en novembre elle est invitée à la cérémonie de remise des trophées le 12 décembre à Avoriaz. ” Déjà être sélectionnée par le jury m’a semblé incroyable, mais recevoir en plus le trophée du public a constitué une surprise totale ” explique la chercheuse.
En effet, le jour de la cérémonie est aussi décerné un trophée du public, résultat des votes sur internet. Pour Anne-Virginie Salsac, ” cette reconnaissance montre que le public se sent concerné par la science et la recherche, et certainement plus particulièrement par ces thèmes en lien avec la santé “.
Rendre la science attractive et équitable
Constatée depuis plusieurs années dans l’ensemble des pays de l’OCDE, la part des étudiants dans des cursus de sciences et technologies baisse régulièrement. ” Les jeunes semblent de moins en moins attirés par les sciences. Alors, si grâce à ces trophées, des jeunes gens et en particulier des jeunes femmes, pouvaient découvrir la passion que suscite le métier de chercheur et choisir d’embrasser une carrière scientifique, tous, nous aurions gagné notre pari : celui de transmettre ce si beau virus, qu’est le virus de la découverte ! ” explique la jeune femme.
Elle ne manque pas non plus de souligner l’importance de mettre en avant des femmes inspirées, épanouies, à la pointe de leur domaine. ” Même si des efforts sont réalisés afin d’assurer des conditions d’embauches équitables entre hommes et femmes dans les métiers de la science, d’importantes disparités existent encore dans de nombreuses disciplines ” précise Anne-Virginie Salsac. Une situation, que la chercheuse ne peut que déplorer, d’autant qu’une forte érosion de la parité hommes/femmes est observée au cours de la carrière.
” Il est important que des jeunes femmes puissent se projeter dans les métiers de la recherche et s’y épanouir. Le monde de la recherche ne peut prospérer que dans la diversité et la pluralité. A nous de les cultiver ! ” souligne la jeune femme.
Faciliter l’appropriation par le monde médical
Si chaque jour apporte de nouveaux défis aux équipes de chercheurs, ” que de défis restent à relever en biomécanique des fluides pour comprendre toute la complexité du corps humain et continuer à développer les technologies de diagnostic et les thérapies de demain ” souligne Anne-Virginie Salsac. Les médecins utilisent couramment des informations anatomiques, comme des images scanner, IRM ou provenant de l’imagerie ultrasonore, mais beaucoup plus rarement des informations d’ordre biomécanique. Il est donc important de rendre accessibles les nouveaux outils aux praticiens non spécialisés et d’informer la communauté médicale des progrès réalisés dans ce domaine.
La spécialiste de la mécanique vasculaire donne l’exemple du traitement de vaisseaux anormaux congénitaux reliant la circulation artérielle directement au circuit veineux qu’il est possible de boucher à l’aide d’une ” colle ” chirurgicale. ” La méconnaissance des mécanismes et des réactions chimiques entre la colle, le sang et les vaisseaux sanguins est un frein à la maîtrise de la technique en clinique et à la formation des jeunes radiologues interventionnels ” explique la chercheuse. Plus largement, Anne-Virginie Salsac souligne l’importance d’échanger entre les disciplines afin d’être capable d’appréhender des problématiques interdisciplinaires complexes. Mécanique des fluides et des solides, transferts de masses ou réactions biochimiques, les spécialités sont nombreuses et la réalité souvent mutiphysique.
Dans un tel contexte scientifique, ” il est indispensable de dépasser les champs disciplinaires et de coupler les approches expérimentales et numériques ” souligne la chercheuse qui insiste pour que les outils de simulation numérique soient aussi accessibles aux praticiens. Femme en or ou scientifique à la pointe des enjeux et des méthodes de la recherche actuelle ? Anne-Virginie Salsac est sans doute un peu les deux. Sans doute est-ce pour cette raison que le CNRS n’a pas manqué de lui décerner une médaille de bronze en 2015, reconnaissant ainsi la grande valeur scientifique de ses travaux.