Prendre de l’altitude d’esprit avec le pionnier Bertrand Piccard
Début octobre, l’UTC a eu le plaisir d’accueillir à la Maison de la Culture d’Amiens le « savanturier » Bertrand Piccard. Il a donné une conférence sur le thème : « l’esprit pionnier pour inventer le futur » sur fond de son expérience avec le Solar Impulse. Retour sur la dose de créativité et d’improvisation qu’il faut pour réaliser l’impossible parfois.
«Solar Impulse n’a pas été construit pour transporter des passagers mais pour transporter un message. Nous voulons démontrer l’importance de l’esprit pionnier, encourager les gens à remettre leurs certitudes en question. Notre monde a besoin de nouvelles solutions pour améliorer la qualité de vie de l’humanité. Les technologies propres et les énergies renouvelables en font partie », rappelle d’emblée Bertrand Piccard lors de la conférence qu’il tenait à Amiens à l’invitation de l’UTC. À bord de l’avion solaire Solar Impulse 2, Bertrand Piccard et André Borschberg ont accompli en 2016 l’exploit de faire le tour du monde sans carburant, grâce à la seule énergie du Soleil.
Une épopée humaine et technologique, capable d’inspirer les politiques environnementales et la société de demain. Sa force : l’innovation créative au service d’une vision. L’addition des forces de plus de cinquante collaborateurs épaulés par une centaine d’experts et de conseillers permet de repousser les limites et de réaliser d’impressionnants progrès technologiques. De nombreuses anecdotes dans cette aventure rappellent aussi à quel point l’adaptabilité et l’improvisation ont été également de mise dans ce qui était pourtant si bien préparé. « Par exemple, l’avion solaire Solar Impulse 2 a dû durant le voyage, être mis à l’abri sous un hangar, spécialement conçu, à Nagoya, au centre du Japon. Nous avions dû y faire escale dans l’attente d’une météo clémente. Nous avons dû improviser et notre équipe a vécu des moments difficiles. »
Ambition et humilité
Dans ce projet pointu et futuriste, l’empirisme n’est pas de mise. Chaque concept, chaque pièce de l’avion solaire doit passer plusieurs tests pour être certifié « apte à voler ». « J’ai mis en place tout un mécanisme d’innovation par la créativité. Pour moi, innover repose aussi sur des notions psychologiques. C’est se mettre dans un état d’esprit. Celui d’aller chercher autre chose que ce que l’on connaît. Cela nécessite beaucoup d’honnêteté, d’humilité et d’ambition », confie le « savanturier » suisse qui est également psychiatre. Il a tout de suite répondu présent à l’invitation de l’UTC, car « c’est une université technique et qu’il est très important de rappeler le rôle créatif, innovant et écologique que doit prôner la technologie ».
Pour lui, innover, c’est être en rupture par rapport au statu quo, par rapport à ce que l’on a toujours fait et toujours pensé. La créativité artistique et l’innovation technologique utilisent finalement le même processus. « On essaie de casser les paradigmes pour être en rupture et essayer de trouver d’autres choses. L’artiste, comme l’explorateur, comme l’innovateur, sont des gens qui ne sont pas satisfaits avec ce qu’ils ont. Ils veulent autrement, différemment et mieux. L’industrie aéronautique est prise dans un carcan. Si on est plus grand selon elle, on est plus lourd. Pourtant, nous avec Solar Impulse, malgré sa taille, nous avons réussi à le rendre léger. C’est d’ailleurs l’industrie navale qui est parvenue à construire cet avion, car l’aéronautique pensait que c’était impossible. »