Un concours pour repenser les bords de Seine
En troisième année de cursus Humanités et technologie spécialité Génie des systèmes urbains, Alexandre Murer a participé au concours organisé par l’institut d’urbanisme Ergapolis. L’objectif était d’imaginer un nouvel usage pour trois sites en bord de Seine actuellement délaissés par les habitants : une ancienne plaine agricole à Chanteloup-les-Vignes près de Paris et les rives du fleuve à Rouen. Son équipe Seinographie a remporté le premier prix. Retour sur une expérience enrichissante à plus d’un titre.
Quelles ont été vos propositions pour retrouver une fonction à ces lieux inutilisés ?
A Chanteloup, les sols sont pollués par des métaux lourds à cause du passé industriel du site. Nous avons donc proposé d’implanter des cultures non alimentaires qui permettent d’extraire les polluants tout en produisant des écomatériaux pour la construction. L’aspect de cet écoparc se renouvellerait chaque année grâce à la rotation des cultures tout en préservant également la qualité des sols. A Rouen, notre objectif était de redonner une attractivité aux rives de la Seine occupées actuellement par des activités industrielles et une friche ferroviaire. En suggérant une réorganisation des espaces de stockage dédiés à la logistique en concertation avec les entreprises, nous avons libéré des espaces pour aménager une piste cyclable. Les rives asphaltées actuellement peu propices à la balade et au tourisme retrouveraient ainsi de l’attractivité. Pour la friche ferroviaire, un aménagement évolutif a été imaginé. A l’horizon 2025, ce site pourrait accueillir une gare de la ligne grande vitesse Paris Normandie – entre Le Havre et l’aéroport Charles de Gaulle. Pour faire face à cette incertitude, notre projet contient plusieurs scénarios d’aménagement en fonction de la réalisation ou non de ce grand équipement.
Qu’est-ce qui a séduit le jury ?
Nous avons développé une approche originale que nous avons nommé « Culture du paysage ». L’objectif était de prendre en compte la richesse du patrimoine naturel et historique du fleuve pour dépasser les oppositions entre espaces urbanisés et campagne. Les solutions que nous avons imaginées visent à préserver une continuité entre le bâti et les espaces naturels, entre le passé et le futur. Jusqu’à maintenant, les urbanistes avaient plutôt tendance à proposer des aménagements complètement nouveaux à partir de rien. Notre dossier tente d’utiliser au maximum ce qui existe déjà pour des questions de coût mais aussi d’histoire et d’acceptation par les habitants. Nous avons aussi insisté sur la concertation avec les différents acteurs. Sur la plaine agricole de Chanteloup, il existe des occupations illégales de certaines parcelles. C’est seulement par le dialogue que l’on peut résoudre cette situation complexe.
Comment ont été constitué les équipes ?
Les trois équipes étaient composées de neuf étudiants venus de chaque école partenaire. Les disciplines représentées étaient donc très variées. Notre équipe était constituée d’étudiants en architecture, aménagement, une urbaniste, un sociologue, un paysagiste et deux ingénieurs. Pour faire collaborer tous ces profils spécialisés, nous avons dû adopter une démarche transversale pour chaque site. La sociologue et le paysagiste de notre équipe avaient déjà une expérience professionnelle importante. J’ai beaucoup appris à leur contact.
En tant qu’ingénieur, qu’avez-vous apporté au projet ?
A l’UTC, nous apprenons à travailler en mode projet, j’ai utilisé ces connaissances méthodologiques afin d’avancer plus vite collectivement. Pour rendre le fonctionnement de notre groupe plus efficace, j’ai mis en place des outils collaboratifs en ligne, bien formalisé le déroulement des réunions avec la rédaction systématique d’un ordre du jour et d’un compte-rendu.
La filière GSU nous donne une vision très étendue et pluridisciplinaire des problématiques d’urbanisme, cela m’a permis d’envisager l’avenir des trois sites dans un cadre régional et national plus large. Il me semblait par exemple important de remettre nos propositions dans le contexte du bouleversement des infrastructures de transport. Avec le Grand Paris, les voies fluviales et ferroviaires vont en effet connaître de grands changements qu’il est important de prendre en compte. Nous avons tenté d’imaginer le futur en cohérence avec ces évolutions globales.