Hybridation des formations : une innovation pédagogique
Le projet ET-LIOS « Enseignements Technologiques de niveau LIcence Ouverts pour une industrie du futur compétitive et Soutenable » est un projet d’hybridation des formations d’enseignement supérieur dédié à l’industrie du futur.
Le projet ET-LIOS développe des contenus pédagogiques « hybrides », conçus pour être utilisés dans les formations en sciences de l’ingénieur et industrielles, sur des sujets liés aux technologies 4.0, en mettant l’accent sur la compétitivité et la soutenabilité. Le projet est porté par un collectif académique de 14 universités partenaires, avec pour chef de file l’UTC, issu du groupement d’intérêt scientifique S.mart et lauréat du programme « PIA3 Nouveaux cursus à l’université ». Financé par l’Agence nationale de la recherche au titre du programme d’investissements d’avenir, le projet a été lancé en novembre 2020, en lien avec la situation sanitaire et pour répondre à la nécessité d’assurer la continuité pédagogique des enseignements. En effet, les 14 universités partenaires du projet ont mis en commun les expériences acquises pendant la période COVID-19, en matière de pédagogie à distance et de continuité des formations. Elles ont mis au point des modules pédagogiques hybrides qui répondent également à des besoins du type « apprentissage en autonomie », « classe inversée » et autres modalités de formations innovantes. Le projet s’adresse aux apprenants et aux enseignants de licences SPI (sciences pour l’ingénieur), EEA (électronique, énergie électrique, automatique), licences pro dans la thématique, BUT (Bachelor universitaire de technologie) GMP (génie mécanique et productique), GEII (génie électrique et informatique industrielle), GIM (génie industriel et maintenance), QLIO (qualité, logistique industrielle et organisation), MP (mesures physiques), SGM (science et génie des matériaux), PEC (packaging, emballage et conditionnement, cycles préparatoires intégrés des INSA, Polytech, UT, et également première année de cycle ingénieur.
Pédagogie active…
« La pédagogie active est privilégiée. Les étudiants à distance peuvent utiliser ces logiciels de simulation comme un jeu vidéo, dans un environnement ludique. Les outils mis à disposition permettent de faciliter les apprentissages, en particulier la vérification en ligne de la validité des actions engagées par l’apprenant. Les plateformes sont accessibles, pilotables et exploitables à distance. Elles permettent de générer de la “vraie donnée” pour illustrer tous les métiers au travers de leurs aspects de maintenance », souligne Benoît Eynard, enseignant-chercheur en génie industriel, Responsable scientifique du PIA ET-LIOS. Il repose sur six modules pédagogiques : Conception-simulation-prototypage 3D, Fabrication avancée et métrologie, E‑Maintenance des systèmes cyber-physiques de production, Jumeau numérique et virtual commissioning des systèmes de production automatisée, Ingénierie soutenable et responsable et Systèmes intelligents et modélisation multiphysique.
… et innovante
Ce dernier, par exemple, a pour objectif de former les futurs techniciens et ingénieurs à la conception dans une perspective d’intégration des fonctions mécaniques, électriques, électroniques et logicielles. Dans le contexte de la conception de systèmes connectés, intelligents et adaptatifs, l’ingénieur intègre des fonctions structurelles, sensorielles et motrices liées par une intelligence. La conception et la réalisation de ces composants complexes, légers et résistants, doués d’une forme d’autonomie, capables de réaliser des mesures et des mouvements ou des adaptations de leur comportement, nécessitent la mise en oeuvre de compétences nouvelles. « Après une introduction présentant les grandes tendances liées aux évolutions des produits, notamment constatées dans le cadre du développement de systèmes mécatroniques, des cyber-physical systems et des smart products, plusieurs thématiques sont abordées comme la pensée système, l’ingénierie système, l’ingénierie des exigences, le Model Based System Engineering associé au langage SysML et une sensibilisation à la logique de vérification/validation. Un cas fil rouge, autour d’un drone terrestre grimpant pour inspection de structure, sert d’illustration tout au long de ces apprentissages. L’exemple du drone est également utilisé de manière récurrente dans les travaux dirigés de mise en application des connaissances et savoir-faire. Le temps présentiel est consacré à un projet de conception, simulation et réalisation jusqu’au prototypage physique d’un dispositif semi-autonome, pilotable à distance », explique Matthieu Bricogne, enseignant-chercheur à l’UTC et responsable du module E. Des modalités pédagogiques innovantes comme la revue de modèles pair à pair ont également été imaginées et des solutions numériques associées ont été développées en partenariat avec le groupe de recherche universitaire de l’établissement Jean- François-Champollion.
Pour une société durable
Le module Ingénierie soutenable et responsable vise, quant à lui, à fournir du matériel pédagogique open source et à former les enseignants de l’enseignement supérieur afin qu’ils puissent intégrer les questions socio-écologiques dans leurs enseignements. « Que l’on parle de transition écologique, d’enjeux énergie-climat ou encore de développement durable, l’enjeu est le même, à savoir la transformation de notre société et notre économie en systèmes résilients. Intégrer les enjeux socio-écologiques dans nos formations, nos métiers et nos vies, c’est reconnaître la nécessité d’un changement. Le métier d’ingénieur porte une double casquette. Il est à la fois source du problème environnemental en raison de son implication dans l’utilisation des ressources et de l’énergie et la production de déchets mais est également le plus à même de trouver des solutions à ces problèmes. L’ingénieur joue donc un rôle charnière entre la technique et la société », détaille Tatiana Reyes- Carillo, enseignante-chercheuse à l’université de technologie de Troyes et responsable du module F. Ainsi, l’objectif du module Ingénierie soutenable et responsable est de questionner et de repositionner l’ingénieur de demain au sein de notre société.
Apporter des connaissances aux enseignants-chercheurs pour alimenter leur réflexion
La collaboration avec différents établissements et l’implication des enseignants des cursus ciblés (BUT, licences) favorisent l’homogénéisation des modules de formation ainsi que des outils à développer et à partager. « Certes, il ne faut oublier le soutien technico-pédagogique du projet qui repose sur un triple enjeu. Celui de l’outil collaboratif avec plusieurs contributeurs, celui de la structuration des contenus, leur mise en forme et celui de la pérennité des ressources. Nous travaillons à l’UTC autour de chaînes éditoriales développées en interne pour gérer ces trois dimensions », souligne Manuel Majada, responsable de la cellule d’appui pédagogique de l’UTC. Résultats : une vraie valeur ajoutée pour des documents plus structurés, plus complets, confortables et interactifs pour les étudiants. La suite ? Continuer à travailler autour des communautés créées pour une production de documents encore plus aisément réutilisés et poursuivre la réflexion sur des scénarios d’usages attractifs.
DES SOUS-PROJETS AU SERVICE DE L’HYBRIDATION PÉDAGOGIQUE
- Développement de l’infrastructure numérique de virtualisation des solutions logicielles et d’hébergement des contenus pédagogiques.
- Structuration, développement et déploiement des contenus pédagogiques.
- Mesure de la performance du projet et de l’impact sur les formations cibles.
OBJECTIFS ET RESSOURCES PÉDAGOGIQUES OFFERTS PAR LE PROJET ET-LIOS
- Développer de nouveaux contenus pédagogiques scientifiques et technologiques, en favorisant l’autonomie des apprenants.
- Expérimenter ces contenus auprès d’enseignants et d’apprenants de niveau licence.
- Mettre à disposition et valoriser ces contenus pédagogiques mutualisés auprès des membres de S.mart et plus largement des acteurs académiques au plan national.
- Développer des plateformes et des ressources compatibles avec une hybridation des enseignements et autres formes de pédagogies innovantes, et les mettre à disposition de la communauté éducative.
- Mesurer la performance du projet et de l’impact sur les formations cibles, auprès des étudiants et des enseignants.
TROIS QUESTIONS À…
Maxime Blampain, 21 ans, en licence pro à l’UTT Conception & processus de mise en forme des matériaux l’an passé et actuellement en master mécanique numérique et conception à l’INSSET de Saint-Quentin.
Quel a été l’apport du projet ET-LIOS dans votre propre apprentissage ?
J’occupais le poste d’alternant assistant ingénieur à l’UTC au sein du projet ET-LIOS et mon rôle était de participer à la création de contenus et d’apporter ma vision étudiante aux différents contenus proposés, de m’assurer que de la clarté des cours et énoncés. Cette formation m’a permis de développer mes connaissances, notamment dans le domaine des matériaux. Cette alternance au sein du projet ET-LIOS m’a beaucoup apporté sur l’aspect informatique puisque je suis issu d’une formation plutôt axée sur la conception mécanique. Ce sont deux domaines qui sont à mon sens complémentaires.
Comment avez-vous vécu cette période de cours en distanciel ?
Cette période a été assez compliquée, je dois dire. Rester derrière un écran avec le casque sur les oreilles pour ne pas déranger le reste de la maison n’était pas agréable. L’interaction avec les collègues et les professeurs était compliquée. Les TP étaient difficiles à suivre étant donné que nous n’avions pas les machines à notre disposition et lire des dizaines de pages de PDF sur l’utilisation des machines était pesant. Alors l’hybridation des cours est une bonne formule lorsque le support est bien structuré et que le contenu est adapté. Oui, c’est une bonne formule lorsque l’on ne peut pas venir sur place comme en ce moment avec la rupture d’approvisionnement en carburant.
Quelles sont les vertus de cette pédagogie ?
Les aspects positifs de cette formule sont évidemment une meilleure flexibilité du travail, la possibilité de gérer ses problèmes personnels, les imprévus tout en continuant de travailler. Par exemple, la voiture ne démarre pas donc je dois rester à la maison mais je peux faire cours en visio. Je suis depuis ce début d’année en alternance au Cetim à Senlis et mon projet professionnel est d’évoluer au sein d’un bureau d’études dans le domaine du sport automobile ou de l’aéronautique.