Des outils IA différenciés selon les applications

Professeur des universités dans la spécialité mathématiques appliquées, Florian De Vuyst est chercheur au laboratoire Biomécanique et bioingénierie (BMBI). Il détaille les différents modèles d’intelligence artificielle (IA).
Parmi les modèles d’IA les plus utilisés figurent les réseaux de neurones artificiels profonds. « Ces modèles ont l’avantage d’établir une relation précise entre les données d’entrée et les données de sortie. Cependant, la phase d’apprentissage nécessite un gros volume de données (mesures, observations, résultats de simulation, données contextuelles…) et exige d’importantes ressources de calcul. Ce type d’IA peut être utilisé pour mieux comprendre le fonctionnement de dispositifs expérimentaux complexes où plusieurs physiques sont impliquées. Les réseaux de neurones sont capables de reproduire le comportement général de systèmes multiphysiques et permettent de réaliser des études de sensibilité et d’optimisation sur les paramètres de fonctionnement », explique-t-il. L’utilisation de réseaux de neurones profonds est envisagée au sein du laboratoire, en collaboration avec Timothée Baudequin, pour prédire le comportement de dispositifs d’électrofilage. « Ce sont des machines qui produisent des nanofibres permettant de fabriquer des matrices (scaffolds) pour les cultures cellulaires », assure-t-il. Parmi les autres modèles d’IA utilisés à BMBI figure également l’apprentissage statistique ou machine learning. « Des membres de l’équipe Caractérisation et Modélisation personnalisée du système MUSculo-squeleTtique (C2MUST) utilisent ce type de modèles pour déterminer le comportement de systèmes musculo-squelettiques et, par exemple, en prédire le vieillissement. C’est une approche probabiliste qui tient compte des incertitudes sur les modèles, les données ou les conditions expérimentales », souligne Florian De Vuyst.
D’autres outils d’IA sont consacrés à l’aide au traitement d’images permettant par exemple la détection d’anomalies ou la recherche de caractéristiques importantes dans les images, pas forcément visibles à l’œil. « Cela peut être des images statiques ou des vidéos mais aussi des images 3D ou même 4D dynamiques. C’est un des axes de recherche d’Isabelle Claude qui a dirigé la thèse d’Abdelhadi Essamlali sur la reconstruction des voies biliaires. Il s’agit là d’une approche patient-spécifique où on reconstitue en volume l’organe du patient en vue d’aider le praticien dans sa préparation à l’acte chirurgical », ajoute-t-il. Ce sont souvent les usages qui déterminent le développement de tel ou tel type d’IA. « Prenons le cas de la détermination du comportement mécanique des tissus vivants. Habituellement, on définit une ou plusieurs lois et on essaie de trouver celle qui reproduit aux mieux les mesures expérimentales. Maintenant, nous utilisons des techniques d’IA où nous intégrons l’ensemble de ces lois empiriques dans une famille de lois plus générales et c’est le réseau de neurones qui va trouver la sous-famille et les coefficients qui soient les plus fidèles à la réalité. C’est en quelque sorte une approche générale intégrée permettant d’être plus généraliste et plus précis dans la modélisation d’un tissu biologique », détaille-t-il.
Enfin, plus récemment sont apparues des utilisations de l’IA permettant l’accélération des simulations numériques de modèles mécaniques. « Il s’agit par exemple de réseaux de neurones informés par la physique qui ont l’avantage d’être plus généraux et plus rapides que les solveurs classiques telles les méthodes d’éléments finis. Dans la phase d’apprentissage des réseaux de neurones, on utilise ce que l’on appelle une fonction de perte (loss function). Dans un PINN, la fonction de perte est un résidu d’équation. Le problème est résolu lorsque la loss atteint zéro », précise-t-il. Aujourd’hui, les modèles d’IA irriguent la plupart des domaines. Il n’en demeure pas moins qu’une certaine vigilance reste de mise concernant les biais possibles. « L’IA doit être considérée comme un assistant qui, en particulier dans le domaine biomédical, permet de fournir une analyse ou un diagnostic complémentaire devant être impérativement validés par l’humain », conclut Florian De Vuyst.
MSD