Le tour d’Eiffel

« Le plus étonnant chez Gustave Eiffel, c’est sa capacité à savoir s’entourer des meilleurs spécialistes et à capter l’attention des hommes influents de son temps, dès les débuts de sa carrière » note l’enseignant et chercheur, Frédéric Seitz.
A l’heure ou l’exposition universelle 2025 se prépare en France, avec son livre « Gustave Eiffel, le triomphe de l’ingénieur » édité chez Armand Colin, Fréderic Seitz, architecte DPLG et professeur d’urbanisme à l’UTC, nous dévoile des aspects méconnus du plus célèbre ingénieur français. Derrière l’image du créateur génial, promoteur de l’industrialisation, cet ouvrage nous révèle l’itinéraire d’un homme d’affaires habile doublé d’un scientifique de talent.
La biographie de Frédéric Seitz dépeint une personnalité forte et complexe dont les plus grandes qualités ne sont pas forcément techniques. « Le plus étonnant chez Gustave Eiffel, c’est sa capacité à savoir s’entourer des meilleurs spécialistes et à capter l’attention des hommes influents de son temps, dès les débuts de sa carrière » note l’enseignant et chercheur. Sorti de l’Ecole centrale avec un diplôme en chimie, le jeune ingénieur n’a aucun appui pour faciliter les débuts de sa carrière. Un premier poste chez un entrepreneur en constructions métalliques va lui permettre de faire ses premières armes avec le matériau qui fera sa gloire. « Les similitudes avec le parcours de Francis Bouygues, un autre centralien, qui a créé une entreprise de construction en béton armé devenue florissante puis un empire industriel diversifié, sont étonnantes » compare le chercheur.
Un opportuniste talentueux
Aboutissement virtuose d’une carrière vouée au métal, l’épisode de la tour Eiffel dévoile aussi des aspects du personnage parfois bien loin de la légende. Dans l’ouvrage, on découvre que Gustave Eiffel a en fait développé une idée émise par d’autres. « Il a laissé les ingénieurs de son bureau d’études travailler sur le projet. Quand celui-ci a été suffisamment avancé, il l’a pris en charge et l’a financé en partie avec ses propres deniers, ce malgré une forte opposition des milieux intellectuels et artistiques parisiens » raconte l’auteur. De cette obstination naîtra un exploit technique exceptionnel mais aussi une grande réussite financière puisque les tickets d’entrée rentabiliseront rapidement la construction… Les derniers chapitres abordent la carrière scientifique méconnue de Gustave Eiffel à la fin de sa vie. Lourdement condamné dans l’affaire du canal de Panama, l’ingénieur abandonne son entreprise pour se consacrer à la recherche. « A la fin de sa vie, Eiffel a mené des recherches dans trois domaines : la télégraphie sans fils (TSF), la météorologie et l’aérodynamique. Ses travaux lui valent la reconnaissance des milieux scientifiques. D’aucuns disent même qu’il aurait été l’un des précurseurs de l’aviation contemporaine » note l’historien.
Les 300 pages de Frédéric Seitz évoquent également plusieurs aspects de la vie personnelle de l’ingénieur dont l’étrange ménage formé par Eiffel, sa fille et son beau-fils, un ingénieur qui reprendra plus tard l’entreprise. Elles montrent comment tout en menant une vie publique flamboyante, Gustave Eiffel a réussi à maintenir sa vie privée dans l’ombre et contribué à la construction de son propre mythe.