Un engagement écologiste et humaniste
Dès ses origines, l’UTC s’est distinguée en promouvant des enseignements en sciences humaines. Avec pour objectif de former des « ingénieurs humanistes ».
Un projet de recherche portant sur l’engagement écologiste des ingénieurs est monté avec le soutien de la direction à la recherche de l’UTC et en partenariat avec Antoine Bouzin, un doctorant de l’université de Bordeaux. « C’est un projet qui s’articule autant à la participation des étudiants au séminaire de recherche GE90 qu’à l’UV IS00 qui, elle, est à la pointe de l’enseignement. Il s’agit là de problématiques relativement nouvelles et le corpus de connaissances est loin d’être stabilisé. D’où le couplage très fort entre enseignement et recherche à l’inverse de thématiques où l’enseignement se base sur des connaissances stabilisées », explique Hadrien Coutant, sociologue au Costech. Le but du projet de recherche ? « Essayer de comprendre les ressorts de l’engagement écologique des ingénieurs. Un projet qui part de l’observation empirique suivante : dans les mouvements écologistes, il y a beaucoup d’ingénieurs, alors que, paradoxalement, parmi les diplômés du supérieur, les ingénieurs constituent la profession la moins politisée », souligne-t-il.
Projet Marie-Curie
Ce projet de réseau doctoral s’intègre dans la catégorie « Science d’excellence » du programme Horizon Europe. La spécificité de ce projet ? « C’est un projet qui vise à financer des thèses et une formation doctorale afin de créer une communauté de chercheurs autour d’un sujet innovant », assure David Flacher, économiste au Costech. Un projet dans lequel l’UTC est pleinement impliquée. « Nous avons proposé de travailler sur les politiques économiques pour la transition écologique. L’idée étant que si on veut penser cette bifurcation, il faut non seulement sortir des silos disciplinaires mais aussi académiques en associant d’autres acteurs », explique David Flacher. Les axes retenus dans le cadre de ce projet ? « Nous avons défini trois grands thèmes. Le premier concerne l’analyse critique des dimensions sociotechniques de la transition. Le deuxième porte sur le choix de scénarios macroéconomiques qui tiennent compte du flux de matières, des rapports Nord-Sud ou encore des cycles de vie des produits, par exemple. Enfin, un dernier volet plus socio-écologique sur la transformation des organisations, celle du travail ou encore le rôle de la démocratie, etc. », souligne David Flacher. Un projet qui comptera 11 doctorants.
Économie de fonctionnalités
Maître de conférences en économie, Frédéric Huet s’est très vite intéressé à la problématique de la soutenabilité. Parmi ses axes de recherche ? « Si on pense “soutenabilité”, on doit se poser la question du changement de modèle économique que cela implique. Il s’agit donc de réfléchir à des questions telles les valeurs d’usage à mobiliser, la rémunération à appliquer, etc. Très rapidement, pour ma part, je me suis intéressé à l’économie de fonctionnalités. Dans ce modèle, on ne cherche plus à vendre les biens en eux-mêmes mais à vendre l’usage des biens. Un modèle qui, sur le plan environnemental, présente a priori certaines vertus. D’une part, on peut mutualiser les moyens pour produire ces services. Ainsi, bénéficier d’un service de transport individuel ne nécessiterait pas forcément d’être propriétaire de son véhicule. Mais le plus intéressant, c’est de se dire qu’à partir du moment où on ne vend plus des biens matériels mais leur usage, le producteur reste le peut imaginer, comme Michelin, louer les pneus aux transporteurs routiers et se rémunérer au kilométrage. Avantage ? L’entreprise, qui reste propriétaire du produit, a tout intérêt à ce que les pneus soient le plus durables possible puisque c’est elle qui supporte les coûts du produit sur l’ensemble de son cycle de vie. Ce qui est bon pour l’environnement », explique Frédéric Huet. Autre axe, cette fois transversal entre Costech et TIMR en la personne d’Olivier Schoefs, directeur du génie des procédés sur la gestion des biodéchets. Un projet destiné à répondre aux exigences de la loi climat et résilience qui, à partir de 2024, oblige les collectivités à déployer notamment des services de recyclage des biodéchets. « Dans ce cas précis, il s’agit de répondre à diverses questions : quels services on met en place, quel modèle économique pour ces dispositifs méthaniseurs ou autre, comment les organiser, l’appropriation de ces services par les usagers, etc. D’autant que, dans le cas des biodéchets, contrairement à une analyse classique du cycle de vie, on est confronté à leur variabilité d’un quartier à l’autre, d’une saison sur l’autre, etc. », estime Frédéric Huet.
Low-technicisation
Pour Hugues Choplin, enseignant-chercheur en philosophie et sociologie, la low-technicisation requiert de la « High Science », une grande interdisciplinarité, et surtout une autre vision de l’innovation. D’ailleurs, certains industriels commencent à s’approprier cette problématique qui donne lieu à des projets concrets de recherche technologique. Pour preuve ? Un projet de recherche associant Costech et Magali Bosch du laboratoire Roberval et portant sur la soutenabilité du système industriel aéronautique à horizon 2050. « Avec Airbus Atlantic, il s’agit de réfléchir à la soutenabilité du système industriel aéronautique à l’horizon 2050. Certains acteurs de ce constructeur veulent dépasser la problématique concernant la réduction des émissions de CO2 par l’utilisation de l’hydrogène par exemple et s’interrogent sur le coût climatique de la fabrication même des avions. Comment, dans ce cas de figure, lowtechiser le processus de production lui-même ? Autrement dit, aller vers une forme de “permafacture” comme ils le disent eux-mêmes », précise Hugues Choplin.
Tensions entre développement des EnR et maintien de la biodiversité
C’est à la suite d’un appel à projets piloté par Price Waterhouse Cooper sur « les tensions ou conflits entre, d’une part, le développement des énergies renouvelables et, d’autre part, le maintien de la biodiversité » que Pascal Jollivet, enseignant-chercheur en économie, fut sollicité. « Ce qui était intéressant dans ce projet, que j’ai commencé par décliner, c’est qu’il s’appuyait sur un mélange d’expertise et de recherche », dit Pascal Jollivet. Son rôle précis dans le projet ? « J’ai travaillé en particulier sur la “controverse” dans le sens de controverse publique. L’idée ? C’est d’étudier en quoi il y aurait antagonisme entre le développement des énergies renouvelables et le maintien de la biodiversité. Il fallait donc reconstituer les controverses liées à ce débat en puisant dans le web social tout ce que les gens disaient à ce sujet. Je suis parti de deux sources différentes. La première concernait l’expression du citoyen “lambda” et la seconde le point de vue d’universitaires à partir d’articles de recherche. À partir de là, j’ai comparé la manière dont la controverse s’exprimait chez les chercheurs et comment elle s’exprimait dans la société civile. Et je me suis rendu compte que dans chaque groupe, il y a une sorte de “trou noir”, autrement dit un certain nombre d’impensés mais surtout qu’il y a des sujets abordés dans l’un et complètement occultés dans l’autre comme la thématique de l’effondrement, absente chez les scientifiques, alors que les gens font le lien entre maintien de la biodiversité et crainte de l’effondrement », détaille Pascal Jollivet.