TSH, plus inclusif et responsable
Le département Technologie et sciences de l’Homme change de nom et devient Technologie, sociétés, humanités. L’ancien nom du département remontait à 1986, année de sa création à l’UTC.
Dès sa naissance en 1972, l’UTC s’est singularisée par la volonté d’accorder une place importante aux sciences humaines et sociales dans la formation des étudiants. La conviction du fondateur de l’UTC à l’époque, Guy Deniélou, était que l’on ne peut connaître l’être humain sans connaître les objets qu’il construit, et inversement. « C’est presque devenu aujourd’hui une banalité dans le paysage des formations d’ingénieur. Tout le monde reconnaît l’importance et l’intérêt des sciences humaines. Pour l’UTC, la différence doit continuer à se faire dans l’exigence que nous portons, qui ne réduit pas les sciences humaines et sociales à des savoirs utilitaires, distrayants ou professionnalisants. Il convient de poursuivre et de renforcer l’articulation entre technologie et sciences humaines et sociales. Ce projet a encore plus de sens aujourd’hui, dans le contexte des crises écologiques, informationnelles, et politiques que nous connaissons. En témoigne également le succès du cursus Humanités et technologie, qui propose à l’UTC une véritable synergie entre sciences humaines et sociales et ingénierie », affirme Pierre Steiner, directeur du département TSH et professeur de philosophie.
Un département qui évolue
Ce changement de nom est en continuité avec une nouvelle façon, pour le département, de présenter et de donner un sens à son offre pédagogique : les « défis TSH ». Trois défis qui se posent de plus en plus à l’ingénieur d’aujourd’hui et à l’ingénieur de demain ont été identifiés : imaginer de nouvelles alternatives ; raconter un avenir désirable ; inclure et prendre soin. « Il était donc opportun de revoir notre façon de nous nommer et d’être connus à l’UTC et à l’extérieur. Le nouveau nom est plus ouvert et inclusif. Il reflète aussi mieux la diversité de la centaine d’enseignements que nous proposons à l’UTC. Le terme “technologie” a été conservé, car nous poursuivons toujours le projet de comprendre les façons dont les techniques rendent possibles et transforment nos manières de connaître, d’interagir, de communiquer ou encore de nous organiser. “Sociétés” fait référence aux sciences sociales et aux sciences économiques, mais aussi aux responsabilités qui incombent à l’ingénieur aujourd’hui, quelles que soient que les situations dans lesquelles il ou elle travaille, poursuit Pierre Steiner. “Humanités” recouvre nos enseignements en langues, communication, philosophie, histoire, linguistique, et les nombreuses manières dont l’humanité habite la Terre par les techniques. »
L’ingénieur doit aussi rendre des comptes
De nouveaux enseignements ont également été lancés, comme celui sur les philosophies de la nature et l’ingénieur contemporain, et un enseignement d’introduction à la philosophie politique. Ici aussi, il s’agit de proposer des formations permettant aux étudiantes et aux étudiants de comprendre les défis générés par la crise écologique, défis qui ne sont pas seulement scientifiques ou techniques. « De plus en plus, les ingénieurs et les structures qui les emploient doivent et devront “rendre des comptes”. C’est l’une des facettes de ce que l’on appelle la “responsabilité sociétale”. L’innovation à laquelle je contribue, de quelle façon participe-t-elle à un monde, à une planète ou à une société que l’on peut dire désirable, inclusive ou soutenable ? Qui émancipe-t-elle ? Qu’est-ce qu’elle rend invisible ? À quoi invite-t-elle à renoncer ? L’ingénieur doit être en mesure de se positionner et d’écouter d’autres parties prenantes. Il ne peut plus se cacher derrière des critères d’efficacité, des normes impersonnelles, ou derrière une “neutralité” qui n’a jamais été rien d’autre qu’une façon d’entériner l’ordre établi. Ces questions de positionnement éthique et sociétal ne se résolvent pas par des algorithmes, mais cela ne veut pas dire qu’elles ne concerneraient pas l’ingénieur. Au contraire ! Il s’agit de compétences aussi importantes que les compétences scientifiques et techniques. »
Loin du département de culture générale
Articuler les sciences humaines et sociales avec la technologie, entendue comme étude et conception des systèmes techniques, tel est le socle de TSH. Au moins deux raisons peuvent justifier cette inclusion. La première est que l’ingénieur est amené à travailler dans de nombreuses situations qui ne sont pas seulement scientifiques ou techniques. « Il ne fait pas que concevoir, calculer, paramétrer, modéliser ou contrôler. Il doit aussi argumenter, manager, communiquer, négocier, imaginer, respecter la loi… L’ingénieur n’interagit pas seulement avec des ingénieurs, il est aussi en relation avec des travailleurs, des citoyens, des justiciables, des usagers… La deuxième raison, plus transversale, est que concevoir un dispositif technique, c’est aussi concevoir le milieu dans lequel les usages de ce dispositif prendront place, en transformant, et c’est fondamental, les projets, l’expérience et les capacités des utilisateurs. Nous ne sommes donc pas un département de “culture générale”, un département qui proposerait des méthodes d’insertion professionnelle aux étudiants, comme rédiger des CV, ou un département qui mettrait une couche de vernis humaniste sur leur formation scientifique et technique », conclut-il. L’articulation entre technologie et sciences humaines et sociales doit se faire autour d’objets techniques. À l’UTC, les sciences humaines et sociales étudient la technologie par la technologie. De nombreux enseignements TSH sont justement en lien avec les plateformes technologiques du laboratoire Costech : il s’agit de comprendre pour faire, et de faire pour comprendre.