Femmes dirigeantes, dans le BTP aussi !
Comment une entreprise comme Brezillon s’empare-t-elle de la question de l’égalité femme-homme ? Le monde du BTP avait déjà commencé sa transformation depuis plusieurs années, mais la société avance et le BTP doit continuer a évoluer. Vision de l’intérieur avec le témoignage de Céline Anciaux, responsable du développement commercial chez Brezillon.
Ingénieur TP04 de l’ESTP (Grande école d’ingénieurs de la construction), Céline Anciaux a d’abord choisi les métiers de la route, qui la passionnaient. Pendant 16 ans au sein d’Eurovia, une filiale du groupe Vinci, elle apprend sur les matériaux routiers, sur les chantiers urbains ou d’infrastructures routières ou techniques. « J’ai eu la chance d’évoluer dans différents services en commençant sur le chantier “Connaître le terrain est pour moi la base !”, en passant par le bureau d’études pour répondre à des appels d’offres et revenir au terrain en conduite de travaux, puis en tant que cheffe de secteur. J’ai pu participer et/ou diriger des chantiers de 2 x 2 voies sur 8 km, des restructurations ou bien des aménagements de nouveaux quartiers en entier, étudier des chantiers aéroportuaires, mener avec mes équipes le chantier de la clairière de l’Armistice en forêt de Compiègne. J’ai rejoint Brezillon en 2021, avec la possibilité de faire évoluer mon parcours avec de nouvelles compétences… Réparer hier pour construire demain avec la dépollution des sols, la restauration de sites en friche et le génie écologique pour positionner le BTP au cœur de l’environnement mais en ayant conscience des enjeux et des besoins de la société qui continue son avancée technologique », explique la responsable commerciale aujourd’hui, ce qui lui permet d’avoir une grande transversalité avec tous les services, du bureau d’études aux travaux en passant par la communication pour accompagner les clients et trouver une réponse à leurs besoins.
Sortir de la vision encore machiste du BTP
Selon une étude pour l’association Grandes Écoles au Féminin menée par Ipsos entre 2003 et 2005, 62 % des chefs d’entreprise pensaient dans les années 2000 que les femmes étaient moins disponibles, 55 % qu’elles étaient moins mobiles et 35 % qu’elles avaient moins d’ambition. Cette même étude établissait que 88 % des diplômées de grandes écoles travaillaient pourtant en moyenne 50 heures par semaine, 71 % effectuant fréquemment des déplacements et 62 % caractérisant la réussite d’abord par la réussite professionnelle. Si cette étude portait sur le monde du travail en général, les femmes pouvaient le faire dans le BTP, mais les hommes n’en ouvraient pas encore véritablement les portes. « Pour dire la vérité, le BTP a du mal à sortir de cette vision très “costauds-machos-virils” avec un patriarcat très marqué… Ça colle aux chaussures de sécurité comme une bonne couche de bitume brûlante. Pourtant, si on devait regarder dans le rétroviseur, que de changements ces deux dernières décennies ! Mais, enfin, pourquoi donc se demander ce qu’apportent les femmes dans le BTP ? Eh bien ! tout simplement ce qu’elles peuvent apporter dans tous les domaines de la société et du monde professionnel : un enrichissement par la diversité, la diversité de réflexions, de points de vue, de modes de management, d’idées et de méthodes », assure Céline Anciaux. L’apport des femmes dans le BTP a donc contribué à dépoussiérer cette vieille image pour permettre aux métiers de la construction d’aborder une phase clé : leur transformation et leur évolution au sein de la société moderne. « Notre secteur a ainsi pu voir des jeunes femmes oser aimer les travaux ou l’ingénierie de la construction, etc., et permettre de créer un vivier de talents plus fourni avec une diversité de compétences, de sensibilités et d’approches qui enrichissent toujours les équipes pour concevoir, adapter, réhabiliter ou construire le monde de demain. »
Un engagement réel vers l’égalité salariale aussi
L’égalité femme-homme a été un des sujets de la loi de réforme des retraites déjà lancée en 2010 qui imposait aux entreprises de plus de 50 salariés de travailler et d’aboutir à un accord d’égalité ou un plan d’action. Bouygues Construction a donc très vite planché sur cet accord et il a d’ailleurs été revu en 2017 et en 2021 et sera revu tous les 4 ans pour répondre aux ambitions mixité du groupe évoquées précédemment. « Nos RH sont maintenant formées à l’égalité des chances, des partenariats sont créés avec Elles Bougent et We Link le réseau des femmes managers de BY créé en 2013. Un travail est mené sur l’égalité salariale qui a pu exister ou existe encore selon les postes ou les histoires de chacun. Quand j’ai commencé en 2004 dans les travaux publics, il était très rare de voir des femmes dans les travaux et celles qui voulaient y faire carrière étaient parfois plutôt orientées vers les bureaux d’études… “Car tu sais le chantier c’est dur…” C’est là que la passion et la volonté font la différence ! On s’accroche, on se retrouve dans des réunions où on est la seule femme et où on vous demande d’apporter le café en “rigolant”. Aujourd’hui, dans le groupe Bouygues, j’ai pu constater un engagement réel de tous les acteurs de l’entreprise pour l’égalité homme-femme. Mais, si des mesures ou actions sont suivies par des KPI (Key Performance Indicators), c’est que le combat n’est pas terminé et qu’il y a encore beaucoup à faire. »
Les femmes ont un grand rôle à jouer
Chez Bouygues, il y a une véritable incitation pour présenter des profils féminins dans les filières masculines et inversement et les écoles doivent aussi voir leur proportion de féminisation sensiblement augmenter. Des démarches sont mises en place dans l’entreprise mais aussi à l’extérieur pour faire évoluer les mentalités. « Moi j’étais une gentille petite fille sage, mais je n’ai jamais considéré qu’être ingénieur BTP était un métier de mec et je n’ai jamais classé les métiers par genre. Que dire alors des femmes qui s’engagent dans l’armée ou chez les pompiers ! Si elles ont les compétences, alors why not ! Chez Brezillon, la filiale Génie environnemental de Bouygues Bâtiment, spécialisée dans la dépollution des sols, la valorisation matériaux, les terrassements et plateformes complexes et le génie écologique, nous sommes maintenant à 20 % de femmes cadres-ETAM confondus mais Bouygues Bâtiment France s’est donné l’ambition d’atteindre les 35 % toutes filières confondues », ajoute Céline Anciaux qui a pu bénéficier de systèmes de tutorat et mentorat. Enfin et au cœur de l’égalité homme-femme au quotidien, Bouygues s’engage dans un combat contre le sexisme et le harcèlement. « Des référents sont nommés dans les entités permettant de remonter des faits ou questionnements et de lutter contre le sexisme ordinaire de tous les jours qui peut anéantir une personne dans son estime de soi. Je pense que c’est certainement un des combats les plus complexes car c’est un phénomène de société qui s’invite dans l’entreprise, conclut-elle. Avec les années, j’ai vu arriver des jeunes femmes déterminées quand elles avaient fait ce choix et des comportements masculins évoluer aussi. Finalement, quand on constate que ça fonctionne très bien dès l’instant où les collaborateurs sont ouverts et ont une intelligence d’esprit, alors c’est beaucoup plus simple, je pense, de mettre en application les lois et les accords. »
KD