3 questions à Mosè Tosin, Directeur mondial achats composants chez AGCO à Beauvais
Qu’en sera-t-il des machines agricoles en 2045 ?
À la suite d’un travail de recherche mené lors d’entretiens avec plusieurs profils dans le secteur agricole, je peux dire qu’il sera plus que jamais question de transition énergétique et d’autonomie des machines. Dans la recherche que nous avons présentée, l’autonomie complète n’est pas une priorité demandée par les utilisateurs mais un futur possible : les agriculteurs souhaitent des machines qui restent contrôlables. Ils préfèrent des outils agiles et modulaires, plutôt que de grands tracteurs complexes à opérer et entretenir. Le futur de l’agriculture est plus axé sur l’agriculture de précision et l’agronomie, ainsi que sur la gestion des coûts et l’accès aux compétences. Attirer des travailleurs qualifiés est de plus en plus difficile dans ce secteur. Donc il ne faut pas oublier les notions de sécurité et de confort au travail. L’automatisation ne remplacera jamais complètement la main‑d’oeuvre du fait des coûts et de la flexibilité offerte lors des pics de demandes. De plus, il y a l’émergence de systèmes de niche comme les fermes verticales ou la culture hydroponique.
L’intelligence artificielle est-elle entrée dans ce secteur agricole ?
La digitalisation sera de plus en plus présente. Big data et intelligence artificielle font partie déjà de l’agriculture de précision. Cela apporte de nouvelles méthodes de production agricole et permet d’améliorer la prise de décision grâce à toutes les informations récoltées sur les données. Dans les entretiens menés pour notre travail, il apparaît que l’IA a un gros potentiel dans ce secteur pour certains, mais représente une potentielle menace dans le même temps pour d’autres exploitants qui se demandent s’ils devront se contenter de suivre les recommandations de l’IA sans savoir ce qu’il y a derrière, sans oublier les préjugés que tout cela implique. Certains ont aussi mis en avant le potentiel de la blockchain pour la traçabilité, permettant aussi d’intégrer davantage de process afin d’éviter la marchandisation. Un autre sujet évoqué à plusieurs reprises est la mutualisation des talents et des machines, pour gagner en efficacité et favoriser les investissements : certains prévoient une préférence pour des machines plus spécialisées, plutôt que des tracteurs multi-usages.
Justement, quel est l’avenir du tracteur et du machinisme agricole en général ?
Malheureusement, le public voit encore l’agriculture comme un secteur polluant, pourtant les nouvelles techniques en agronomie, produits et certifications, sont très souvent perçues comme intrinsèquement bonnes. Il y a une mauvaise perception de ce secteur par l’opinion publique qu’il va donc falloir changer. Pour la plupart des interviewés, cela va passer par la responsabilité en matière de durabilité avec des machines agricoles durables elles aussi, modulables et simples d’utilisation et à remettre à niveau. Les machines agricoles du futur devront s’intégrer dans un système plus global que celui de l’exploitation agricole et prendre en compte les nouveaux développements en agronomie !
KD