58 : Une électromobilité durable
Face à l’urgence climatique et à la crise énergétique qui se profile à la suite de la guerre en Ukraine, la France a décidé d’accélérer le pas dans le domaine des énergies renouvelables. Dans ce domaine, l’UTC et particulièrement l’équipe du laboratoire Avenues sont engagées sur deux fronts. Celui de l’électromobilité avec des travaux sur l’optimisation des stations de recharge couvertes de panneaux photovoltaïques (PV) mais aussi celui la production d’énergie issue de PV sur le site de l’université. Un mouvement que le décret tertiaire publié au Journal Officiel en 2019, enjoignant aux propriétaires et occupants de bâtiments tertiaires tant privés que public de réduire significativement leur consommation d’énergie par rapport à 2010, année de référence, a accéléré.
Professeure des universités, Manuela Sechilariu est directrice, depuis 2016, de l’unité de recherche Avenues à l’UTC. Parmi ses axes de recherche figurent les micro-réseaux et, plus récemment, tout ce qui a trait à l’électromobilité. Plus particulièrement, les stations de recharge couvertes de panneaux photovoltaïques et dotées d’un pilotage intelligent.
Des axes de recherche qui, face à l’urgence climatique, ont stimulé un grand nombre de projets tant à l’échelle nationale qu’internationale. Pour preuve ? Les projets au niveau national qui s’inscrivent dans la recherche d’une plus grande mobilité électrique. Ainsi, Mobel City est lancé en 2017 et PV2E_Mobility en 2020, tous les deux financés par l’Agence de la transition écologique (ADEME), alors que, en juillet 2021, c’est au tour de Smart_PV4EV spécifique à l’UTC dans le cadre d’un contrat plan État-Région (CPER) « Énergie Électrique 4.0 » (EE 4.0). « Le premier dont nous avons été, en 2017, lauréats à la suite d’un appel à projets est également soutenu par un partenaire industriel, SYSTRA, spécialisé dans les problématiques liées au transport à l’échelle nationale, mais aussi par l’Agglomération de la région de Compiègne (ARC). Un des objectifs du projet ? Il s’agit de trouver le meilleur moyen de déployer les stations de recharge pour les véhicules électriques (VE) alimentées par du photovoltaïque (PV). Un projet qui illustre autant les compétences accumulées au sein de l’unité que l’interdisciplinarité qui y règne, puisqu’il se trouve à la croisée des domaines des transports – mobilité électrique, des énergies renouvelables, de l’aménagement urbain et territoire durable mais aussi des sciences sociales », explique Manuela Sechilariu.
Le deuxième, qui s’inscrit dans la même ligne, a attiré de nombreux partenaires dont le CEA, Enedis, Tecsol, une entreprise spécialisée dans le solaire, ou encore SAP dans les logiciels et le pilotage intelligent des stations de recharge. Un projet qui porte sur l’énergie et la puissance PV embarquées et stationnaires pour et dans les transports, Avenues étant en charge des études concernant les systèmes et infrastructures équipés en sources PV stationnaires utilisées pour la recharge des VE.
Toujours sur la même problématique Smart_ PV4EV. « Cette fois, il s’agit de montrer l’avantage du PV dans la recharge des VE et de s’interroger sur l’impact sociétal et l’acceptabilité sociale », ajoute-t-elle.
Enfin, à l’international le programme scientifique PVPS de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). « Ce projet, qui se termine fin 2024, représente la contribution française à la Tâche 17* du programme de l’AIE dédié au PV et au transport », précise-t-elle. Le rôle précis des chercheurs d’Avenues dans ces projets ? « Nous sommes les porteurs de ces projets et coordinateurs de Mobel_City, de PV2E_Mobility. Quant au projet international impliquant l’IAE, j’en suis task manager avec un collègue japonais et leader de la sous-tâche 2. Cette dernière porte sur les conditions de faisabilité et des exigences requises pour utiliser au mieux les stations de recharge des VE avec des panneaux PV. Enfin, Smart_PV4EV, dont je suis responsable, s’inscrit dans un grand projet CPER impliquant la plupart des laboratoires de génie électrique des Hauts-de-France », indique Manuela Sechilariu.
Tous ces projets visent ainsi à l’optimisation de l’utilisation du PV, que ce soit pour la mobilité ou pour les bâtiments. Un objectif qui nécessite de nombreuses études théoriques en amont. « Il s’agit de concevoir et de tester un ensemble de méthodologies, d’outils tant d’implantation ou de dimensionnement que de régulation et de contrôle intelligent. En effet, la station de recharge est basée sur un micro-réseau constitué d’un ensemble de stockage stationnaire, de panneaux PV, d’une connexion au réseau et des charges telles que les bâtiments ou les VE. Pour que la satisfaction de l’utilisateur et l’utilisation de l’énergie PV soient maximales, on développe des algorithmes permettant tant l’optimisation off line, c’est-à-dire en dehors du fonctionnement en temps réel, que celle on line pour un contrôle du fonctionnement en temps réel. On montre qu’un VE peut se charger, même en décembre à Compiègne, avec plus de 75 % d’énergie PV pour réaliser 40 km », explique-t-elle. Toutefois, dans ce type de projets, les études théoriques ne se limitent pas seulement aux aspects scientifiques et techniques mais impliquent aussi, puisqu’il s’agit de développer les usages du PV, d’autres champs de connaissances. « Ainsi, nous faisons appel à des urbanistes pour développer des méthodologies et des outils d’aide à la décision pour les acteurs territoriaux concernant le déploiement le plus judicieux possible des stations de recharge. Nous travaillons également avec Costech, laboratoire de sciences sociales de l’UTC, afin d’étudier l’impact sociétal et l’acceptabilité sociale », conclut Manuela Sechilariu.
*Photovoltaic Power Programme Systems Task 17 (https://iea-pvps.org/research-tasks/ pv-for-transport/)
Professeur des universités, Fabrice Locment est chercheur au sein de l’unité de recherche Avenues. Il est également directeur du département de génie urbain. Les recherches sur l’électromobilité ont mené à la mise en place de STELLA qui sera transformé en living lab dès l’automne 2022.
Au sein d’Avenues, l’idée de la plateforme technologique STELLA ou Smart Transport and Energy Living LAb est ancienne. Mais c’est en 2016, grâce à un financement dans le cadre d’un CPER, qu’elle fut lancée et devint opérationnelle début 2017 pour enfin se transformer en living lab.
Concrètement ? « C’est un dispositif expérimental permettant de valider des concepts liés à la technologie mais pas seulement avec des objets technologiques puisque l’on introduit aussi l’être humain en interaction avec ces objets. D’où l’appellation de “living lab”. Ainsi, dans STELLA, il y a du photovoltaïque (PV), du véhicule électrique (VE), du stockage d’appoint et une connexion au réseau électrique national, mais c’est l’être humain qui occupe la place centrale », explique-t-il. Ce qui a suscité le déclic ? « C’est en voyant le grand parking non couvert du centre d’innovation que l’idée a germé en 2010. On a pensé que ce serait intéressant d’installer du PV sur ces surfaces inutilisées. Bien entendu, au début c’était des idées de recherche qui nous ont guidés. À cette époque, nous travaillions avec Sunvie, une société spécialisée dans le PV, mais nous n’avions pas le financement nécessaire pour aller plus loin. Et c’est en 2016, grâce au CPER, que le projet s’est concrétisé », précise-t-il.
Une évolution toute naturelle au sein d’Avenues qui abritait historiquement la plateforme PLER, l’acronyme de « production locale d’énergie renouvelable ». « Avec PLER, on est toujours dans un système multisource, multicharge mais dont la finalité est d’alimenter un bâtiment. PLER existe toujours et fonctionne très bien. Particularités ? C’est une vraie plateforme de recherche avec des câbles partout mais un peu limitée dès que l’on monte en puissance. Mais, avec la problématique de l’électromobilité, s’invite ainsi l’alimentation du VE. Et, avec STELLA, on change de format. Ce n’étaient plus ni les mêmes puissances, ni le même fonctionnement. Surtout, STELLA permet des applications tant bâtiment que VE », souligne Fabrice Locment.
La transformation de STELLA en living lab ? « Jusqu’ici avec STELLA, on émulait les VE, c’est-à-dire que l’on faisait des essais sur les VE de l’UTC, en particulier, leur comportement en consommation d’énergie pour les émuler sur des systèmes physiquement présents à STELLA et pouvoir ainsi répéter les tests. À ce stade, l’aspect humain n’était pas pris en compte. Avec le living lab, on va aller plus loin et mettre l’humain au centre. Ainsi, l’ombrière de PV qui abrite 9 places de parking dont 3 réservées pour les VE dédiés à la recherche du laboratoire Avenues va passer au tout électrique. On a, d’ores et déjà, installé 3 bornes bicéphales pour le personnel de l’UTC », affirme-t-il.
Un développement qui permettra d’analyser le comportement d’utilisateurs réels avec des contraintes réelles. « Notre objectif est que le living lab soit fonctionnel en septembre. À ce moment-là, nous allons contacter le personnel pour savoir qui est doté d’un VE, qui serait intéressé par charger. Ils pourront ainsi utiliser le système avec comme contrepartie leur autorisation à récupérer toutes les données. À savoir la charge à leur arrivée, la charge lorsqu’ils quittent, la durée de la charge, le type de charge – lente ou rapide –, etc. Des données qui vont nous permettre de mettre en place des lois de commande pour charger intelligemment les véhicules », ajoute-t-il.
Un projet dans le droit fil de leur recherche et qui a pour objectif principal de déséquilibrer le moins possible le réseau national électrique. « Le réservoir énergétique d’une batterie dans un VE telles la Zoé de Renault ou la e208 de Peugeot est de l’ordre de 50 kWh. Or, l’ombrière actuelle ne produit que 29 kWh sous conditions quasiment optimales. D’où le projet de construire 10 nouvelles ombrières sur le parking du centre d’innovation », conclut Fabrice Locment.
Enseignant, Fabien Lamarque est responsable pédagogique de la branche génie urbain et membre associé à l’unité de recherche AVENUES. Il anime l’atelier-projet « Production d’énergie photovoltaïque à l’UTC ». Julien Sautjeau, étudiant en 5e année, spécialité Bâtiment, en fait partie.
Un projet-atelier qui s’inscrit, urgence climatique oblige, dans la politique de développement durable lancée par l’université. Une politique que le décret tertiaire publié au Journal Officiel en 2019, enjoignant aux propriétaires et occupants de bâtiments tertiaires tant privés que publics de réduire significativement leur consommation d’énergie par rapport à 2010, année de référence, a accélérée. Une réduction réalisable grâce à deux grandes solutions : l’amélioration de l’enveloppe énergétique des bâtiments et/ou la production d’énergie renouvelable (EnR).
« Dans le cadre de la formation d’ingénieur en GU, on a un format pédagogique très professionnalisant qui fait intervenir à la fois les enseignants-chercheurs et les étudiants au sein d’ateliers-projets chargés de répondre à des commandes passées par des clients divers et variés. Concernant l’atelier-projet sur la production d’énergie PV, la commande émane de la Direction du patrimoine immobilier (DPI) de l’UTC », explique Fabien Lamarque.
Une mission qui nécessite trois grandes compétences. La première concerne tout le processus de conversion de l’énergie, la deuxième implique la modélisation et le calcul pour mesurer le potentiel d’ensoleillement des différents bâtiments et enfin, la dernière, sur l’interface entre la production d’EnR et les bâtiments. Cette dernière suppose la connaissance générale du bâtiment, les contraintes techniques, la réglementation, etc. « D’où la mise en place d’un groupe d’étudiants et d’enseignants-chercheurs dotés de ces trois compétences », ajoute-t-il.
Les objectifs de cet atelier-projet ? « Il s’agit d’étudier les pistes de réduction de la consommation en énergie des bâtiments et de développer une maquette numérique des sites existants afin de définir les plus adaptés pour l’installation de PV et assurer ainsi la meilleure optimisation énergétique possible », souligne Julien Sautjeau. Un projet qui trouve tout son sens avec des bâtiments qui, pour l’essentiel, ont été construits dans les années 1970 et dont l’enveloppe thermique est assez médiocre. Un projet qui, bien entendu, a un coût. « Lors de cette étude, on a bien sûr évalué le retour sur investissement des panneaux ; des panneaux qui ont une certaine durée de vie mais aussi un impact environnemental. Le gain énergétique est évident mais on a été plus loin puisque l’on a évalué le gain environnemental généré par les panneaux PV comparé au mix énergétique français », détaille Fabien Lamarque.
« Le mix énergétique français, composé pour une large part de nucléaire, est peu émetteur de CO2. Pour le PV, on a fait une analyse du cycle de vie, c’est-à-dire de l’extraction des matières premières à l’installation/exploitation et jusqu’à la fin de vie et le recyclage qui s’ensuit. Or, jusqu’ici le PV a du mal à rivaliser en matière d’empreinte carbone avec le nucléaire », ajoute Julien Sautjeau.
Les conclusions du projet ? « Dans l’étude, on a élaboré différents scénarios d’implantation des panneaux PV. Nous avons agi comme des assistants à maîtrise d’ouvrage. On y détaille ainsi tant les gains potentiels que les risques liés à chaque installation que ce soit sur les toits des bâtiments, au sol, ou encore sur des ombrières de parking. C’est en quelque sorte un diagnostic que l’on a effectué pour le compte de la DPI », conclut Fabien Lamarque.
Nathalie Molines est maître de conférences en géographie à l’UTC depuis 2006. Elle est rattachée à l’unité de recherche AVENUES, et travaille sur les questions d’aide à la décision pour la transition des territoires.
Afin de tenir ses engagements internationaux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre (EGES), la France doit réduire drastiquement les EGES des transports et en particulier celles du transport individuel. Une des voies de réduction est celle de l’électromobilité. Cependant, celle-ci implique, en amont, un déploiement optimisé de bornes recharges.
La réduction des EGES liées au transport ? « Dans l’agglomération de Compiègne, par exemple, les transports individuels représentent 16 % des émissions de GES, c’est la troisième source d’émissions derrière les habitations et l’agriculture. Il y a plusieurs manières de réduire les EGES. Il s’agit de transformer les habitudes des gens en les incitant à prendre les transports en commun ou leur vélo, par exemple. On doit, pour cela, travailler sur les formes urbaines en densifiant les zones desservies par les transports collectifs plutôt que de choisir l’étalement urbain, mais aussi développer les mobilités douces en aménageant des pistes cyclables et enfin, basculer une part non négligeable du parc automobile thermique vers l’électrique. Les incitations financières pour l’achat d’un vélo ou d’un véhicule électrique sont là pour faciliter cette transition », assure-t-elle.
Des mesures qui, si elles aboutissent, vont probablement augmenter le nombre de véhicules électriques en circulation. Ainsi, entre 2018 et 2021, le nombre d’immatriculations de voitures électriques a augmenté de plus de 400 % (source Avere-France) ! Le nombre de points de recharge peine à suivre. « En 2018, on avait une borne pour un peu moins de 7 véhicules. Ce qui faisait moins d’une borne par commune. De ce fait, ce sont essentiellement des personnes vivant dans des maisons individuelles qui acquièrent un véhicule électrique », observe Nathalie Molines.
D’où la volonté de la France et des autres pays européens d’accroître le réseau des bornes de recharge électrique mais aussi d’en optimiser l’implantation territoriale.
En tant que géographe, Nathalie Molines a essentiellement travaillé sur les questions de planification et d’optimisation des bornes de recharge à l’échelle de la ville.
L’idée ? « C’est de réfléchir en amont à la localisation des bornes afin de définir les lieux où elles seront les plus utiles et les plus utilisées. En effet, lors d’une journée d’études avec les différents corps de métiers impliqués dans cette thématique, on a compris que certaines bornes installées en place par exemple dans les Hauts-de- France n’étaient jamais utilisées ou alors si peu. Il s’agit également de réfléchir au bon type de bornes à installer puisque, selon les modèles, la recharge peut être plus ou moins rapide Enfin, il s’agit de faire preuve d’anticipation sur leur impact sur le réseau électrique. Ce qui relève des travaux de Manuela Sechilariu et Fabrice Locment », explique-t-elle.
Une méthodologie d’analyse des potentialités du territoire a été développée dans le cadre du projet MOBELCITY et testée sur la ville de Compiègne. Un outil de recherche amont d’implantations potentielles de bornes, utilisable sur la totalité du territoire français, a également été développé. Il est gratuit et disponible en ligne.
L’état de l’art en matière d’urbanisme et d’optimisation ? « Plusieurs méthodes existent pour planifier et optimiser ces réseaux. Il s’agit d’abord d’analyser la capacité du réseau existant à absorber une demande supplémentaire, de connaître la localisation des utilisateurs types pour la localisation des bornes et enfin observer les usages d’un territoire afin de définir le type de recharge à déployer », conclut Nathalie Molines.
Doctorant à l’UTC depuis 2019, Saleh Cheikh Mohamad a présenté sa thèse en octobre 2022. Elle porte sur l’optimisation des flux énergétiques dans les stations de recharge alimentées par le PV et dédiées aux VE.
C’est dans le cadre de son stage effectué à l’UTC au sein du laboratoire Avenues qu’il commence à s’intéresser à ces thématiques. « Il s’agissait de développer une interface graphique permettant l’interaction entre l’utilisateur et le micro-réseau ou la station de recharge des véhicules électriques (VE) », dit-il. Participant activement aux projets PV2E_Mobility et IEA PVPS Task 17, Saleh Cheikh Mohamad explora, dans le cadre de sa thèse, différentes problématiques liées à l’optimisation de la gestion d’énergie pour les stations de recharge.
« Il s’agissait d’abord de comprendre le système énergétique d’une station de recharge alimentée par des panneaux photovoltaïques (PV), dotée d’un système de stockage, d’une connexion au réseau et dédiée à l’alimentation des VE. Ensuite, il nous fallait optimiser le flux d’énergie, entre les différentes sources d’alimentation – le PV, le stockage, le réseau – afin de minimiser le coût énergétique pour l’utilisateur. Ainsi, selon que l’on soit en heures creuses ou en heures de pointe, le coût énergétique du réseau est différent. À savoir, moins élevé dans le premier cas que dans le second. L’interface propose trois seuils de recharge – lente, moyenne ou rapide. Une interface multicritère donc pour éclairer l’utilisateur. Enfin, l’optimisation est lancée en temps réel à chaque arrivée et départ des VE », détaille-t-il.
Une interface qui permet à l’utilisateur d’indiquer ses préférences et, grâce à un algorithme intelligent intégrant, y compris des prévisions horaires d’irradiation de Météo France, l’optimisation se fait en temps réel. « Selon le choix fait par l’utilisateur, la recharge se fera directement par PV, par le stockage ou par le réseau ou encore un mix des trois basé sur les résultats d’optimisation », décrit-il.
Autres axes de recherche ? « Il s’agit de la problématique de V2G (vehicle to grid). Dans ce cas de figure, ce sont les véhicules électriques qui peuvent alimenter le réseau en cas de pic de consommation. Cela a l’énorme avantage d’envoyer instantanément de l’énergie dans le réseau plutôt que redémarrer une centrale à charbon par exemple. Bien entendu, dans la problématique liée au véhicule électrique, les aspects purement environnementaux tels la durée de vie ou encore le recyclage des batteries nécessitent des études approfondies », conclut Saleh Cheikh Mohamad.
Ingénieure de recherche, Amalie Alchami a rejoint le laboratoire Avenues après un stage à Roberval. Elle travaille sur PV2E_Mobility mais aussi le programme international IEA PVPS Task 17.
Son rôle précis sur la plateforme STELLA ? « Je travaille avec Saleh, sur la partie expérimentale des stations de recharge. J’effectue des tests afin d’étudier différents profils de recharge, à partir de divers critères, dans le but de dimensionner les stations de recharge d’une manière optimale pour répondre à la demande.
Parmi les critères, on peut prendre par exemple le nombre de véhicules électriques (VE) connectés à un instant, le flux et la demande énergétique ou encore la décharge des VE pour alimenter le réseau en cas de pic de consommation. Ce que l’on appelle vehicle to grid (V2G) », indique-t-elle. Sa mission ne s’arrête cependant pas là puisque Amalie Alchami participe également au projet PV2E_Mobility mais aussi à la tâche 17 du programme international IEA PVPS. « Dans le cadre de ce dernier, j’ai développé un outil de prédimensionnement des stations de recharge alimentées par des panneaux PV en prenant en compte l’analyse du cycle de vie. Autrement dit, on doit analyser la performance d’une station de recharge sur la totalité de sa durée de vie, soit 30 ans dans notre cas », souligne-t-elle. Les variables retenues dans l’outil ? « On y intègre notamment la localisation des stations, le niveau des irradiations solaires ainsi que les contraintes géographiques mais aussi la problématique des coûts . Il y a le coût des panneaux, des batteries et des bornes retenues, celui de la maintenance – nettoyage des PV, remplacement des batteries et des convertisseurs, par exemple – et enfin les coûts d’exploitation. On doit ainsi pouvoir calculer le bilan total en tenant compte des revenus sur les 30 ans », précise-t-elle.
Mais les aspects environnementaux et notamment l’empreinte carbone de telles stations de recharge sont, tout naturellement, pris en compte. « On doit réduire au maximum cette empreinte dans tous les éléments utilisés mais aussi intégrer l’empreinte liée à l’installation et la maintenance des composantes », ajoute Amalie Alchami.
Parmi les pistes de réduction envisagées ? « On peut utiliser des PV ou des batteries nouvelle génération dont l’impact carbone est relativement bas ; on peut également faire appel à des matériaux recyclés. On a ainsi construit plusieurs scénarios et on a abouti à un modèle de station dont l’impact carbone s’avère plus faible que celui du réseau national. Ce dernier, basé essentiellement sur le nucléaire, étant déjà significativement décarboné par rapport à d’autres réseaux nationaux », conclut-elle.
Diplômé ingénieur d’IMT Atlantique, spécialité énergie-environnement, Nathanel Dougier poursuit par une thèse aux Arts et Métiers à Aix-en-Provence. Il s’intéresse aujourd’hui à l’enjeu des bus électriques.
Le thème de sa thèse ? « J’ai travaillé sur les micro-réseaux et plus particulièrement sur le dimensionnement des différentes technologies et les stratégies de pilotage associées tout en intégrant des objectifs environnementaux, techniques et économiques. Prenons le cas d’une ville. Elle peut concrètement avoir des objectifs d’autonomie, de réduction des coûts ou des émissions. Cela suppose de choisir les technologies adaptées afin d’atteindre de bons compromis entre les objectifs fixés », explique-t-il. Une thèse qui lui permet de décrocher un poste de chercheur en post-doctorat au laboratoire Avenues. Il y travaille sur le programme scientifique PVPS Task 17 de l’AIE et sur sa contribution française PV2E_Mobility, financée par l’ADEME.
Parmi ses missions principales ? « En plus de mes travaux de recherche, j’assiste Manuela Sechilariu dans le projet dédié à la tâche 17 du programme international de l’AIE. Il s’agit en particulier de participer à l’élaboration du rapport final. Ce dernier compilera l’état des recherches des différentes équipes internationales collaborant à ce programme », souligne-t-il.
Toutefois, son rôle ne s’arrête pas là puisque Nathanael Dougier s’intéresse également à un autre enjeu lié à la mobilité, celui du bus électrique. « Avec le bus, on fait face à des problématiques très différentes de celles de la voiture électrique. En effet, de fortes contraintes pèsent sur le transport par bus notamment en matière de continuité de service pour les usagers mais aussi de recharge. On estime par exemple qu’une voiture électrique a besoin d’une puissance de 7 kW en recharge lente, 50 kW en recharge rapide. Par comparaison, les bus en recharge rapide ont besoin de 600 kW, soit l’équivalent d’une centaine de foyers en termes d’appel de puissance », précise-t-il.
Un domaine qui pose des défis majeurs, surtout en termes de contraintes sur le réseau électrique. « Pour les bus, il peut y avoir différents modes de recharge. Ils peuvent par exemple se recharger la nuit au dépôt. Mais cela suppose qu’ils soient équipés de très grosses batteries. Ils peuvent aussi effectuer des recharges de quelques secondes/minutes en journée aux terminus en bout de ligne ou à certains arrêts. Cela a en revanche des impacts sur le transport des passagers ou encore sur le réseau électrique en cas d’appel d’une forte puissance. Un cas de figure qui nécessiterait l’installation de nouveaux câbles, transformateurs, etc. Il s’agit donc, dans une première phase, d’établir l’état de l’art en la matière », conclut Nathanael Dougier.
Étudiante en dernière année en génie urbain, spécialité Bâtiment, à l’UTC, Mathilde Boesch est responsable de l’atelierprojet dédié à l’acceptabilité sociale et l’impact sociétal des stations de recharge alimentées par PV.
C’est à la suite d’un appel à projet de l’ADEME que cet atelier-projet durant 6 mois et auquel participent 12 étudiants a été mis en place. Son rôle en tant que responsable de l’atelier-projet ? « Je fais un point à chaque séance pour présenter aux encadrants l’avancement du projet et faire l’ordre du jour de la séance. Puis, avec le groupe, on se répartit l’ensemble les tâches à effectuer dans la journée », assure-t-elle.
Une étude qui fait suite à une étude similaire effectuée en 2018. L’objectif ? « Il s’agit de vérifier si l’état d’esprit des Français a évolué sur la question de l’électromobilité et l’utilisation d’énergie PV, d’autant que l’on constate que les ventes de VE connaissent une forte croissance depuis 2019. Il s’agit également de vérifier l’acceptabilité de bornes avec gestion intelligente de l’énergie permettant un échange bidirectionnel. À savoir que le VE peut recevoir de l’énergie stockée des PV mais aussi alimenter sa maison par exemple ou le réseau national en cas de pic de consommation », estime-t-elle.
Les différentes étapes de l’étude ? « On a commencé par une enquête qualitative lors d’entretiens semi-directifs avec des utilisateurs de VE mais aussi d’autres types de transports. De la soixantaine de réponses, on a émis un certain nombre d’hypothèses à vérifier lors d’une enquête quantitative avec la mise en place d’un questionnaire. Nous voulions un échantillon plus large et représentatif de la population française et à ce jour, près de 800 personnes ont répondu », précise-t-elle.
L’analyse des réponses ? « Une analyse question par question puis une analyse globale ont été effectuées ; suivies d’une comparaison avec l’étude de 2018 afin de voir si les mentalités ont évolué et comment. On essaie d’une certaine manière de connaître l’état d’esprit des Français par rapport à l’électromobilité pour cibler les freins et attentes à cette évolution », conclut Mathilde Boesch.