PolarSea, naviguer sans polluer
Voyager sans polluer, une utopie ? Christophe Brière, diplômé de l’UTC, et Sophie Galvagnon ont décidé de révéler ce défi. Leur solution : produire un bateau à voiles ultra-performant et bardé de matériel de mesures, pour associer tourisme et recherche scientifique. En 2025, cap vers le grand nord !
Il y a toujours une frustration du passager quant à son empreinte carbone, et de plus en plus de personnes sont sensibles au fait de voyager moins mais mieux. » Ces mots, ce sont ceux de Christophe Brière, diplômé de l’UTC en ingénierie mécanique en 2010, qui vient de créer avec Sophie Galvagnon la startup PolarSea. Cette startup a pour ambition de proposer, à l’horizon 2025 des croisières touristiques et scientifiques à faible impact carbone dans le cercle polaire.
Si le projet a vraiment débuté l’année dernière, l’idée d’associer bateaux et développement durable ne date pas d’hier pour Christophe : « Je fais de la voile depuis que je suis tout petit, et je me suis dirigé vers les études d’ingénieur pour travailler dans le secteur du nautisme et de la voile. A défaut d’être bon pour faire des courses en bateau, j’ai choisi d’être bon pour construire des bateaux !» A l’UTC, il choisit des suivre des UVs d’entrepreneuriat et de gestion de projet. « J’avais un projet, baptisé « Boat’A Green » , qui consistait à développer un bateau de plaisance éco conçu, explique-t-il. J’ai donc choisi des UVs qui m’ont aidé à me structurer, car elles offrent une boîte à outils et une première expérience méthodologique. Mais en entrepreuneuriat, il faut trouver non seulement le bon projet, mais également le bon timing, la bonne équipe… »
Et pour Christophe en effet, le timing n’est pas encore à la création d’entreprise : « J’ai commencé à travailler dans la course au large, comme ingénieur mécanique et composite au sein du groupe GROUPAMA sailing team. J’avais fait mon stage de fin d’étude là-bas, et j’ai été embauché directement après pour travailler sur la construction du bateau en fibre de carbone. Pour un jeune ingénieur qui sortait de l’UTC, c’était un rêve de gosse ! C’était aussi des responsabilités très fortes, car les pièces qu’on concevait allaient faire le tour du monde, et si elles cassaient, ça allait compromettre toute la course. »
Après cette première expérience, Christophe décide de changer d’air, et part faire un VIE à l’institut polaire français, en s’établissant un an au Svalbard. « Je suis tombé amoureux des régions polaires, confie-t-il. J’ai changé d’orientation après ce VIE, mais j’ai continué à partir sur des croisières comme guide polaire. C’est d’ailleurs lors d’une de ces croisières que j’ai rencontré Sophie, en 2018. » Alors employé chez Total, Christophe commence à travailler avec Sophie sur leur projet de startup : « On a commencé en side-project, les soirs et weekend, puis je suis passé à 80% pendant un an, le temps qu’on viabilise le concept et qu’on ait suffisamment de signes pour se lancer à temps plein, ce qui est le cas depuis mai 2022 ».
Le premier objectif des deux associés est de faire construire un bateau répondant à leurs exigences très précises. « Notre bateau sera un petit paquebot de 70 mètres, à propulsion à voiles, pour 36 passagers et une vingtaine de membres d’équipage, détaille Christophe. Les voiles seront probablement des voiles rigides (semblables à un aile d’avion dressée à la verticale), cinq pour la taille de notre bateau, et recouvertes de panneaux solaires. En effet, lorsqu’on partira en croisière dans le cercle polaire, il fera jour en permanence, et les panneaux solaires seront donc très efficaces. »
La construction du premier bateau devrait débuter à l’été 2023, pour une première croisière deux ans plus tard, au départ d’un lieu qu’il serait possible de rejoindre par un moyen bas carbone. Limiter au maximum les émissions de carbone est en effet l’objectif principal de Christophe et Sophie. « Moi, le premier conseil écolo que je donne, c’est de rester en France, affirme Christophe. Mais on sait que des gens continueront toujours à voyager, alors autant leur proposer des services qui leur permettront de voyager mieux. On serait à 80 a 90% moins impactants qu’une croisière classique. Après, il faut être honnête, une croisière aura toujours un impact le but est donc d’être transparent sur ce qu’on arrive à faire, en terme de réduction d’empreinte carbone. »
Pour limiter davantage l’impact environnemental de leurs croisières, Christophe et Sophie ont eu l’idée de les coupler à des campagnes scientifiques : « L’acceptabilité de ce type de croisière ne peut se faire que si vous avez une visée autre que touristique. Une partie du prix du billet servira donc à financer des missions scientifiques à bord du bateau. Le but est d’amener de la science avec nous, avec 4 places réservées pour les scientifiques, mais aussi avec de l’instrumentation scientifique automatisée, pour prendre de nombreuses mesures en open source. » Une bonne idée qui nécessite de prévoir de nombreux aménagements spécifiques dans le bateau : des filets à plancton, des treuils, de la place pour les appareils de mesures , un labo sec, un congélateur pour les échantillons… Un gros travail qui demande beaucoup de sacrifices personnels, comme le confirme Christophe : « la vie perso en prend un sacré coup, plus que ce que j’imaginais. Mais c’est vraiment passionnant et j’ai encore le temps de faire de la voile, heureusement ! » On lui souhaite bon vent !