Des recherches ciblées sur l’enjeu environnemental
Professeur des universités, Khashayar Saleh est directeur du TIMR dont les activités sont tournées vers la chimie et procédés verts. Des axes de recherche tels les procédés sur les énergies décarbonées, les produits biosourcés ou encore la valorisation des déchets non conventionnels sont privilégiés.
Un des projets phares en matière de procédé décarboné ? « Un de nos axes de recherche principaux concerne le stockage de l’hydrogène solide, un vecteur d’énergie doté de capacités énergétiques très importantes. Généralement, on utilise des vecteurs gazeux pour avoir un rendement ou une efficacité importants. Et qui dit gaz, dit stockage sous pression. L’hydrogène étant, après l’hélium, l’élément chimique le plus petit, il faut une pression très importante de l’ordre de plusieurs centaines de bars, donc une dépense d’énergie conséquente pour le liquéfier », explique-t-il. Cette problématique a incité un partenaire industriel à demander à l’équipe Interfaces et milieux divisés (IMiD) du laboratoire TIMR d’explorer des alternatives au stockage de l’hydrogène. « L’idée est d’emmagasiner l’hydrogène dans une poudre à base d’hydrures de métaux qui sont des vecteurs absorbants constitués des matrices capables de condenser l’hydrogène sous forme chimique », dit-il. L’intérêt de cette approche ? « On va être capables de stocker l’hydrogène à des pressions beaucoup plus basses. Si on prend la problématique de la mobilité, autrement dit l’utilisation embarquée, on va pouvoir remplacer le réservoir d’essence par des cartouches. Ce qui existe d’ores et déjà sur certains scooters. On va pouvoir également alimenter les batteries par des piles à combustible. C’est aussi un stockage plus sûr, les risques n’étant pas les mêmes, en cas d’accident, avec un réservoir à 20 bars contre près de 700 à 800 pour un réservoir de stockage liquide. On a bien démontré la capacité d’absorption de l’hydrogène sur un support solide et dans des pressions et températures compatibles avec l’utilisation d’un véhicule », précise Khashayar Saleh.
La faisabilité de cette technologie a donc été validée, même si de nombreux défis restent à relever. « Le premier concerne la densité ou la quantité d’hydrogène que l’on peut incorporer dans le solide, sachant que le rendement actuel est de 2 %, c’est-à-dire que, pour 100 kg de solide, on n’a que 2 kg d’hydrogène. Or, pour avoir une autonomie de 500 km, il faut 5 kg d’hydrogène. C’est donc le deuxième défi, celui de la masse volumique, puisqu’il faudrait incorporer à la matrice 250 kg de solide. Ce qui, au moment où on allège le poids des véhicules pour qu’ils consomment moins, pose problème. Deux défis qui peuvent être relevés en application stationnaire mais plus difficilement en application embarquée. Troisième défi enfin : le chargement et le relargage à la commande. Si on prend l’exemple d’une station à hydrogène, il faudrait que le chargement soit rapide. On a deux cas de figure : soit on charge directement, soit on va chercher des réservoirs préchargés, solution que l’on a retenue pour les scooters ou pour les vélos électriques. C’est une technologie qui fonctionne pour les petits véhicules mais aussi pour les véhicules lourds. Cependant, l’équation, à ce jour, reste à résoudre pour les véhicules intermédiaires tels les voitures, les utilitaires, etc. Une technologie qui a de réels avantages environnementaux par rapport aux énergies fossiles puisque les émissions de CO2, de CO ou de NOx sont nulles », souligne-t-il.
Au-delà de l’énergie, l’équipe du TIMR s’intéresse également à des solutions alternatives aux produits phytosanitaires chimiques. « Dans ce domaine, on fait face à des préoccupations environnementales mais aussi économiques. Là encore se pose le problème du rendement d’une application phytosanitaire. Ainsi, lors d’une pulvérisation sur les plantations, il se peut que plus de 50 % du produit se disperse dans la nature pour des raisons diverses : soit il rate sa cible du fait du vent par exemple, soit il est confronté à des phénomènes de rebond et enfin il est soumis à l’évaporation. Ce qui engendre un problème de pollution mais aussi d’efficacité. Une des solutions réside dans la formulation de phytosanitaires antidérive, un couplage entre la formulation et la technologie. C’est l’objectif que nous poursuivons avec le projet STIMULE FAUVE financé par la région et piloté par Audrey Drelich, enseignante-chercheuse au sein de l’unité TIMR. Il s’agit d’anticiper l’avènement de nouvelles pratiques (par exemple : le traitement par drone) ou la fin de certains produits phytosanitaires en développant des produits biosourcés », assure-t-il.
Autres axes de recherche ? « À terme, on a défini trois axes : le premier concerne tous les procédés sur les énergies décarbonées ; le deuxième les produits biosourcés et enfin la réduction d’impact environnemental et la valorisation des déchets, classiques ou non conventionnels », conclut Khashayar Saleh.