Ces thèses qui changent la vie : Design et appropriation d’un dispositif d’interactions haptiques pour l’expression et la perception d’attitudes communicationnelles
Une innovation peut être formidable. Mais si l’usager ne se l’approprie pas, elle finira aux oubliettes. Initialement ingénieur pour comprendre comment étaient fabriqués les objets du quotidien, Barthélémy Maillet a peu à peu évolué au gré d’un master de design industriel puis d’une thèse, de 2006 à 2010, de la question de la conception de l’objet à l’étude de son appropriation par les utilisateurs.
« Suite à ma rencontre avec Charles Lenay et l’équipe Costech de l’UTC, j’ai voulu comprendre comment les personnes font entrer –ou pas- les innovations dans leurs usages», explique Barthélemy Maillet.
Pour cela, il a pris comme objet d’étude l’introduction du tactile dans les usages liés à l’informatique. « Il ne s’agit pas ici de l’écran tactile tel qu’on le connait sur les smartphones mais de la possibilité via un dispositif nouveau de s’exprimer à distance grâce au toucher ». Grâce à ses compétences d’ingénieur, Barthélémy Maillet a conçu un petit appareil similaire à une grosse souris d’ordinateur. Une sorte de grosse boule avec des capteurs équipée de ventilateur vibreur et de stimulateurs tactiles du type de cellule braille. Elle contient également un accéléromètre et un capteur de pression. L’objet a été baptisé Phatic pour Perception Haptique (adjectif relatif au langage non verbal) des Attitudes Communicationnelles.
Mais il ne suffit pas de concevoir : il faut aussi réfléchir au langage associé à l’outil. A partir de l’étude des échange en messagerie instantanée Barthélémy Maillet a étudié les échanges de personnes en binôme autour des six émotions de base : peur, tristesse, joie, dégoût, colère. « Je montrais à l’un des images spécifiques comme un film d’horreur et il devait trouver un moyen de retranscrire ses émotions de façon tactile ».
Puis Barthélémy Maillet a laissé les dispositifs Haptic aux testeurs entre 15 jours et un mois tout en leur rendant visite régulièrement pour les interroger, savoir si l’usage de l’appareil les faisait se sentir plus proches. « De ces études est ressortie l’importance de la synchronisation des interactions. Quand l’une des personnes fait autre chose c’est frustrant pour l’autre : elle peut alors l’exprimer en envoyant un petit courant d’air par le dispositif ».
Cette pratique de psychologie expérimentale permet d’anticiper les usages. Aujourd’hui, en tant que designer d’interaction dans les télécoms, Barthélémy Maillet utilise toujours ce cadre de réflexion quand il propose de nouvelles idées.
Parallèlement ces travaux qui s’appuient sur des technologies utilisées par les non-voyants sont aussi un moyen d’imaginer de nouveaux moyens de communication entre voyants et non voyants « où chacun est à égalité ».