De la simulation numérique pour un implant innovant
Anne-Virginie Salsac, directrice de recherche au CNRS au sein du laboratoire Biomécanique et bioingénierie (BMBI) et Laurent Lanquetin, responsable de l’activité mécanique des fluides au sein du groupe mondial d’ingénierie Segula Technologies à Trappes, ont décidé d’unir leurs forces et d’aller plus loin dans le projet d’implant de la valve mitrale destiné au traitement de l’insuffisance mitrale fonctionnelle. Un exemple de partenariat université-industrie.
Là encore, tout commence par un e‑mail envoyé par Laurent Lanquetin à Anne-Virginie Salsac fin 2015, suivi d’une conversation téléphonique autour de ce qu’est “la simulation numérique dans le domaine de la biomécanique des fluides”, précise-t-elle.
Il faut dire qu’Anne-Virginie Salsac a de la suite dans les idées et qu’elle a en plus l’art de les faire aboutir. Elle propose très vite à Laurent de travailler sur un projet de stage de fin d’études et de sélectionner, ensemble, un ou une étudiante. Restait en suspens la question du sujet. “C’est là, à la fin de la conversation, que je lui parle d’un projet innovant sur lequel nous travaillions et qui pouvait donc les séduire. Je leur propose de simuler la dynamique d’une valve mitrale et à terme la pose d’un implant pour la réparer en cas d’insuffisance mitrale”, explique-t-elle.
L’idée ? “Il s’agit d’appliquer la simulation numérique afin d’améliorer l’efficacité d’un dispositif médical”, ajoute-t-elle. Une idée qui a séduit Laurent Lanquetin. Pour preuve ? Très vite, un partenariat en bonne et due forme se noue avec Segula Technologies, leader dans les domaines de l’ingénierie comme l’automobile, le ferroviaire, le naval ou encore l’énergie. “Sur le site de Trappes, nous sommes principalement spécialisés dans l’automobile avec un bureau calcul d’une centaine de personnes, ingénieurs et doctorants. Notre rôle est d’accompagner les clients dans divers projets pour le développement de pièces spécifiques. Mais, dans un souci de diversification, nous avions commencé à développer de plus en plus de projets dans la bioingénierie et le biomédical et le projet d’Anne-Virginie s’inscrivait parfaitement dans ce cadre”, précise Laurent Lanquetin.
C’est ainsi qu’entre en scène, en tant que stagiaire, Thibaut Alleau, étudiant en dernière année dans une école d’ingénieurs à Toulon. “Nous travaillons, chaque année, avec notre pôle recherche et innovation du groupe et prenons régulièrement des étudiants pour leur stage de fin d’études afin de développer, notamment, différentes méthodologies numériques. Thibaut s’est montré très motivé et intéressé par le sujet. Ce qui allait nous permettre de travailler sur le développement de stratégies de simulation dans un nouveau domaine. À savoir le biomédical”, souligne Laurent Lanquetin. Mais dans ce domaine, un stage de six mois c’est court. ” Thibaut commençait à saisir toutes les problématiques associées aux écoulements sanguins, mais la suite allait demander un travail colossal. Il faut admettre que simuler les écoulements dans les grands vaisseaux n’est déjà pas simple, mais dans le coeur, une complexité supplémentaire résulte du mouvement des valves, qui s’ouvrent et se ferment en interaction forte avec l’écoulement du sang… En un mot : même simplifié, le problème reste complexe”, explique Anne-Virginie Salsac. Ayant pris goût à la recherche, Thibaut opta pour un doctorat au sein de l’UTC. Une thèse Cifre fut montée afin d’avancer dans le projet. Son objectif ? Répondre à la question du comment. Comment modéliser ? Quelles approches et outils utiliser ? “Aujourd’hui, et alors que la thèse tire à sa fin, nous avons un modèle de valves qui fonctionne et qui permettra de tester des implants. On espère trouver un financement, notamment dans le cadre du plan de relance, afin que Thibaut puisse optimiser les prototypes de l’implant. Dans le cas contraire, nous espérons une nouvelle thèse Cifre”, conclut-elle.