
3 questions à Michel Slama, Chef de service adjoint du service de médecine intensive-réanimation au CHU Amiens-Picardie.
Avec le recul, quel est votre regard sur la crise sanitaire que nous vivons ?
C’est bel et bien un immense chambardement au niveau économique, sociétal et hospitalier que nous subissons. Il nous pousse aussi de manière positive. D’une part, comme il s’agit d’une pathologie nouvelle, cela nous conduit à augmenter nos capacités de recherche, à mieux comprendre cette affection et à améliorer la prise en charge des patients. D’autre part, cette crise nous a poussés à un grand élan de solidarité et d’union entre les hôpitaux, les médecins et les administrations des centres hospitaliers. Nous avons tous oeuvré dans le même sens et cela a bien fonctionné. Nos process sont cohérents et efficaces pour une prise en charge réussie de l’ensemble des malades graves.
Pour les étudiants de France, comme ceux de l’UTC, il n’est plus possible de suivre des cours en présentiel lors des confinements. À quoi peut-on réfléchir pour l’avenir ?
On remarque que l’infection au coronavirus chez les jeunes entraîne des formes asymptomatiques ou peu symptomatiques. Plus de 80 % des cas graves ont plus de 65 ans. Et c’est bien ce que l’on voit à l’hôpital. Le fait que des étudiants se contaminent a peu de conséquences pour eux sur leur santé à court terme, même si l’on ne connaît pas les effets à long terme. Ce sur quoi il faut être réactifs et attentifs, ce sont les mesures à mettre en place dans les universités comme l’a fait l’UTC dès la rentrée de septembre : solutions hydroalcooliques, masques à l’intérieur des amphis et des salles en nombre suffisant pour respecter les distances physiques. Car, selon moi, pour le futur, il ne faudra pas restreindre la pédagogie en présentiel mais trouver des solutions adaptées pour éviter au maximum tout risque de contamination. Le vrai souci en revanche, c’est lorsque ces jeunes se retrouvent dans des fêtes, des soirées et des bars, c’est là qu’ils se contaminent.
Quelle est donc la priorité sanitaire auprès de ce public étudiant ?
On ne peut qu’avoir une attitude pédagogique. C’est même un devoir. Leur expliquer qu’ils peuvent se contaminer, ils doivent protéger leurs familles, pères, mères et grands-parents. Sans immunité collective acquise, il faut garder ses distances et continuer de respecter toutes les mesures, car c’est là qu’est le danger. À savoir que les jeunes contaminent les plus âgés, qui eux vont faire des formes graves de cette maladie. On peut aussi les convaincre en leur montrant des chiffres, des résultats, des images fortes. Des étudiants de l’UTC ont eu cette idée de passer dans des amphis avec des diaporamas explicites mais pas culpabilisants. Un message fort, préventif et bienveillant.